histoires vraies
mac val / musée d'art contemporain du val-de-marne vitry-sur-seine (FR)
collective show
04.02.2023 - 17.09.2023
curators Frank Lamy, Julien Blanpied
9 characters costumes, apure brass bell and a random performance
crédit photo © Martin Argyroglo. Mac Val 2023
→ 1 chraracter from frac bretagne's collection
palais des congrès de montréal
musée des beaux-arts de la chaux-de-fonds
bienalsur - biennale internationale d'amérique du sud
international center of photography nyc
institut français de casablanca
bibliothèque du musée des arts décoratifs
centre pompidou - studio 13/16
frac île-de-france - la vitrine
centre d'art de l'île moulinsart
frac champagne-ardenne : hors les murs
château de la motte-tilly / centre des monuments nationaux
Entre freak show, cabaret et carnaval, Mehryl Ferri Levisse déploie des théâtres psychiques peuplés de créatures hybrides et chimériques déjouant les frontières entre les genres et les règnes. Au diktat rationaliste et fonctionnaliste du monde moderne, il oppose une démesure et une déraison qui laissent libre cours à des fictions où se mêlent histoires familiales, désirs intimes et imaginaires collectifs.
Ces fictions se présentent sous deux formes principales. D'une part, des "captations photographiques" où l'artiste se met en scène dans des espaces domestiques chargés de souvenirs - grenier, baignoire, salon, chambre à coucher, salle à manger et salle de jeux - qu'il chamboule et réagence cul par-dessus tête. Inspiré par des motifs de peinture d'histoire et du portrait classique, il prend des poses absurdes - couché sur un tas de coussins, coincé dans une pile de matelas, allongé sur un lit de moules -, le visage le plus souvent dissimulé dans des cartons, des cubes de Lego ou sous des draps, sinon recouvert d'escargots, de végétaux et de coquillages. D'autre part, des masques et des costumes agrégeant matériaux semi-précieux, organiques et ornementaux - fils d'or, sequins, fourrure, cuir, cheveux, collants, tapisseries et maquillage. Soclés, ces derniers s'apparentent à des trésors ésotériques, à des fétiches vaudous ou à des reliques de rituels chamaniques ; présentés sur des mannequins hyperréalistes ou activés par des performeureuses, ils reconfigurent des corps à la fois neutres et exubérants. Autant de personnages qui s'inscrivent dans des espaces confinés, sans portes ni fenêtres, recouverts de papier peints aux motifs floraux ou abstraits évoquant des tests de Rorschach psychédéliques. Il arrive aussi qu'iels s'invitent dans d'autres espaces, en particulier des centres d'art, qu'ils requalifient instantanément.
Un monde baroque et onirique s'offre ainsi à nous. S'y côtoient des figures aux réminiscences de vamps, drags, bouffons du roi, Zoulous et médecins de peste, comme sorties des limbes et des marges, acteur.rices de fantasmes et de scènes mythologiques. Ainsi la série Anthropophages & Carnassiers (2011) qui réactive le mythe du repas totémique : au cours de ce dernier, les "frères chassés" sacrifient un animal, en réalité substitut du père, et le dévorent pour s'en approprier les pouvoirs. Une manière pour Mehryl Ferri Levisse d'éprouver des devenir-autres par contamination et absorption réciproques entre humains, végétaux et animaux. Il s'agit là d'une nouvelle sorte de tératologie : malformations et monstruosités y sont célébrées comme autant de formes de vie possibles, affranchies des normes sociales et ouvertes à toutes les métamorphoses.
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Cette nouvelle exposition collective réunit les œuvres d’une quarantaine d’artistes de générations diverses. Poursuivant les recherches, autour de la construction du Sujet, développées dans les expositions temporaires depuis 2005, « Histoires vraies » prend la suite de l’exposition collective « Lignes de vies (une exposition de légendes) » (2019) qui explorait les passages poreux entre art et autobiographie, entre réel et fictions. Ce nouveau volet poursuit cette idée que tout est fiction, le réel étant superposition, feuilletage tissé d’histoires diverses et variées en s’attachant cette fois moins aux effets d’aller-retour entre l’art et le monde, mais en proposant des approches parallèles des réalités.
Ces différents artistes ont en commun le recours à des stratégies et postures fictionnelles qui s’ancrent néanmoins, dans des tentatives de description du monde, teintées, entre autres, de narration spéculative voire de documentaire. Ça invente, ça raconte, ça imagine. Elles et ils effeuillent les couches des apparences pour mettre à jour d’autres narrations, pour faire émerger d’autres récits. (Se) raconter des histoires : ce besoin immémorial de storytelling, pour comprendre, articuler, réfléchir le monde résonne tout particulièrement à l’heure de la post vérité et autres avatars peuplant le métavers. Les réseaux sont emplis de ce qui s’appelle symptomatiquement : Réels, Stories… Décidément, tout est histoires. Histoires vraies… Un titre pour le moins paradoxal. Qu’en est-il de la vérité ? De la véracité ? Doit-on croire ce que les artistes nous racontent ? Le réel existe-t-il en dehors de sa formulation ?
De la fiction pour mettre en crise, en questions, déconstruire, faire apparaitre ; de la fiction pour conjurer, éloigner ; de la fiction pour réparer, raconter autrement ; aider, accompagner, transmettre ; mais aussi creuser les apparences, interroger les faits, leur véracité, les modes de narrations mêmes ; de la fiction pour proposer des alternatives aux « grands récits » enfermants, de la fiction pour le simple et joyeux plaisir de fabuler. Pour paraphraser Sarah Ihler-Meyer dans une des notices du catalogue, l’exposition propose « Autant de tragi-comédies minimalistes et de micro-récits aux multiples niveaux de lectures. Chaque regardereuse est invité.e à composer sa propre narration, entre cauchemar et rêve.»
/
english version
Veering between freak show, cabaret and carnival, Mehryl Ferri Levisse's work deploys psychic theatres populated by hybrid and chimerical creatures that ignore the boundaries between genres and realms. To the rationalist and functionalist diktat of the modern world, he opposes an excess and unreason that give free rein to fictions in which family histories, intimate desires and collective imaginations intermingle.
These fictions take two main forms. On the one hand, the are 'photographic captures' in which the artist stages himself in domestic spaces fraught with memories - attic, bath, living room, bedroom, dining room and playroom - which he turns upside down and rearranges. Inspired by motifs from history painting and classical portraiture, he strikes absurd poses - lying on a pile of cushions, stuck in a pile of mattresses, reclining on a bed of mussels - with his face mostly hidden in cardboard boxes, by Lego blocks or under sheets, or covered with snails, plants and shells. On the other hand, masks and costumes combine semi-precious, organic and ornamental materials - gold thread, sequins, fur, leather, hair, tights, tapestries and make-up. Mounted on pedestals, these are like esoteric treasures, voodoo fetishes or relics of shamanic rituals, and when presented on hyper-realistic mannequins or activated by performers the reconfigure bodies that are both neutral and exuberant. All these characters are inscribed in confined spaces, without doors or windows, covered with wallpaper whose floral or abstract motifs are like psychedelic Rorschach tests. Theay also sometimes invite themselves into other spaces, especially art centers, which they instantly transform.
A baroque and dreamlike world i set before us. Figures reminiscent of vamps, drag queens, king's jesters, Zulus and plague doctors rub shoulders here, as if they have emerged from limbo or the margins of society, protagonists in fantasies and mythological scenes. The Anthropophages & carnassiers series (2011), for example, reactivates the myth of the totemic meal during which the 'hunted brothers' sacrifice an animal which is in reality a surrogate for the father, and devour it in order to incorporate its powers. This is Mehryl Ferri Levisse's way of experiencing becoming-others, by reciprocal contamination and absorption between humans, plants and animals. This is a new kind of teratology: malformations and monstrosities are celebrated as possible forms of life, freed from social norms and open to all metamorphoses.
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
This new group exhibition brings together works by some forty artists and several generations. Continuing the exploration of the construction of the Subject, pursued in our temporary exhibitions since 2005, ‘True Stories’ follows on from the group exhibition ‘Lignes de vies – une exposition de légendes’ (2019) which explored the passageways between art and autobiography, between reality and fiction. This new instalment pursues the idea that everything is fiction, that the real is a set of superpositions, layer on layer, interwoven with sundry stories, but this time focusing less on the effects of the toing and froing between art and the world and proposing, instead, various parallel approaches to realities. The artists in this exhibition have in common the use of fictional devices, strategies and postures which, nevertheless, are grounded in an attempt to describe the world, tinged, among other things, with speculative or even documentary narration. Inventing, narrating, imagining. They peel back the layers of appearance to uncover other narratives, to bring forth other stories.
Telling (ourselves) stories: this immemorial need for narrative, to understand, articulate and reflect on the world, is particularly resonant in the age, among other things, of post-truth and the avatars that teem in the metaverse. Social media is filled with what are symptomatically called reels and stories. Decidedly, stories are everywhere. ‘Histoires vraies’. The title is paradoxical, to say the least. Where is truth in all this? Where is veracity? Should we believe what artists tell us? Does reality exist outside its formulation?
Fiction for putting in crisis, for questioning, for deconstructing, for making apparent; fiction for averting, for removing; fiction for repairing, for other ways of telling, for helping, for accompanying, for transmit-ting; but also for going deep into appearances, for questioning the facts, their veracity, the modes of narration themselves; fiction for proposing alternatives to the ‘grand narratives’; but also, fiction for the simple and joyful pleasure of making things up. To paraphrase Sarah Ilher-Meyer in one of the catalogue entries, ‘Histoires vraies’ offers a constellation of ‘minimalist tragi-comedies and micro-narratives with multiple levels of interpretation. Each viewer is invited to compose their own narrative, between nightmare and dream.’
text by Sarah Ihler-Meyer
critique
art critic
artists of the show :
Aletheia (Hugo Dumont, Anthony Vernerey), Alexis Foiny, Alice Brygo, Anaïs-Tohé Commaret, Anne Brégeaut, Anne-James Chaton,
Aurélie Ferruel et Florentine Guédon, Aurélien Mauplot, collectif 1.0.3, Esther Ferrer, Étienne Charry, Farès Hadj-Sadok, Hippolyte Hentgen,
Jean-Charles de Quillacq, Jordan Roger, Katia Kameli, Kenny Dunkan, Kent Monkman, Laura Bottereau & Marine Fiquet, Marie Losier,
Mary Sibande, Mehryl Levisse, Olivier Nottellet, Pejvak, Regine Kolle, Romain Kronenberg, Sam Moore, Sebastien Loghman, SMITH,
Suzanne Husky, Sylvie Ruaulx, Véronique Hubert, Vincent Volkart, Virginie Barré, Yan Tomaszewski, Youri Johnson
tous droits réservés © mehryl ferri levisse / adagp 2023
wallpaper, pattern, motif, papier peint, ornement